L’appel
de la musique
L’art de la durée
Sans doute la musique est-elle, depuis un siècle, la forme élue vers laquelle tendent, en ultime instance, les arts plastiques.
Encore la musique ne se laisse-t-elle pas si facilement réduire. Art de la durée dans le sentiment qu’elle donne d’un temps qui pourrait avec lui-même renouer, sans interruption. Une fugue de Bach ne fuit pas, elle s’édifie. Tel andante mozartien atteint à une sorte d’immobilité à peine tremblante, en suspension comme une goutte d’eau qui perle au broc du « Concert champêtre ». La symphonie parvenant à la coda, impose une résolution qui n’est point sans ressembler à l’établissement des « valeurs » sur la toile. Nous savons bien quand la musique est temps qui passe ou passe-temps : elle raconte alors, elle est discours musical. On ne comparera pas le Beethoven de la « Bataille de Vittoria » ou de la « VIe Symphonie » à celui des trois derniers trios et quatuors. La musique est produit de l’être. Et elle produit de l’être.
Max-Pol au Festival
d’Aix-en-Provence
Ma mère, plus d’une fois, m’a raconté une petite scène de mon enfance. Elle et mon père entrèrent un jour, par surprise, dans la pièce où je chantonnais. Ils me virent manier une règle comme une baguette de chef d’orchestre. Ils me demandèrent si je m’imaginais avoir un orchestre devant moi. « Oui répondis-je. – Quel orchestre ? » insista mon père. Je leur montrai une petite mappemonde sur la table. « L’orchestre des latitudes et des longitudes » répliquai-je fièrement. Sans doute avais-je emprunté ces mots à Jules Verne, sans trop savoir ce qu’ils signifiaient. Mon père, qui avait été armateur, se mit à rire. Il voulut plus d’explications que je ne puis lui donner, car rien n’était plus simple : je conduisais l’orchestre des diverses parties du monde, ce qui ma paraissait naturel, puisque j’appartenais au monde. Il m’en est resté quelque chose.
L’appel de la musique
La souffrance du retour
Lettre de deux amis